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Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 99.djvu/747

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accusent les membres des conseils locaux de n’avoir presque rien changé à l’ancien système, et de se servir de l’argent des contribuables pour subventionner des écoles appartenant à leur culte[1]. On admet généralement que les fonds versés par tous doivent servir aux intérêts de tous : or quel avantage a le non-conformist qui dénoue les cordons de sa bourse pour soutenir des doctrines contraires aux siennes ? Aussi demande-t-il avec obstination que ceux qui veulent donner à leurs enfans une instruction religieuse en couvrent les frais au lieu de mettre les autres à contribution. Nul n’est obligé d’envoyer son fils dans une école protestante, juive ou catholique, mais à plus forte raison aucun père de famille n’a le droit de réclamer de l’état ou des autorités locales certains subsides pour le genre d’éducation religieuse qu’il préfère. Vous tenez à ce que vos enfans soient élevés dans telle ou telle croyance ? — Fort bien, payez pour cela, ou confiez-vous au zèle des pasteurs et des associations volontaires, qui ne manqueront point d’accomplir cette œuvre. Comment expliquer un fait bien connu en Angleterre : les dissidens, dont les ministres ne sont point rétribués par l’état, dont les congrégations s’appuient uniquement sur la piété des fidèles, ne demandent rien au trésor public pour enseigner leurs dogmes, tandis que l’église établie, toute riche qu’elle soit, et les catholiques romains s’adressent sans cesse au gouvernement ou aux pouvoirs locaux afin d’obtenir des secours. Non contens de protester dans les journaux et les meetings contre les abus de la taxe des écoles, quelques Anglais ont tout dernièrement refusé leur argent. « Nous aimons mieux aller en prison, s’écrient-ils, que de forfaire à notre conscience ; or nos convictions nous défendent de payer des instituteurs qui ne sont que les sergens recruteurs du clergé. » Les tribunaux sont forcés d’appliquer la loi ; mais c’est ainsi que commença, il y a quelques années, l’opposition aux church rates, et cette taxe a été abolie. Les dissidens accusent la taxe des écoles d’être une autre contribution déguisée en faveur de l’église.

La loi accorde aussi aux school boards le droit de forcer les enfans du district à suivre les cours de l’écore. La compulsion (c’est le nom que donnent nos voisins au système d’enseignement obligatoire) a été l’objet de vives et nombreuses critiques. Elle était, disait-on, contraire à l’esprit anglais, un-english. Qui ne sait que l’inviolabilité du domicile et par conséquent de la famille est considérée dans toute la Grande-Bretagne comme le boulevard des libertés politiques ? N’y avait-il donc point un grave inconvénient à armer

  1. La loi exclut, il est vrai, l’enseignement du catéchisme ; mais elle ouvre ou ferme la porte de l’école à l’esprit de secte, selon la volonté du conseil.