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Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 12.djvu/593

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même qu’un feddan ne donnât que 260 livres de sea-island middling, évalué à Liverpool au minimum à 16 pence la livre, ce qui ferait 416 francs, combien produirait un feddan de mako ? Environ 400 livres, que l’on peut évaluer à 334 francs. Encore avons-nous supposé que le sea-island est classé middling (moyen), tandis que plus du tiers toucherait probablement à la classification supérieure ; le prix de 416 francs est donc un minimum. Par une culture intelligente, le feddan ensemencé de bonnes graines de sea-island ne produira jamais moins de 550 francs vendu à Liverpool. On voit que les répugnances des adversaires de la plante américaine, au lieu d’être justifiées, ne peuvent tenir contre des faits qui, quoique isolés, sont avérés.. Aujourd’hui même tes producteurs du sea-island. dégénéré, connu sous le nom de gallin, ne pourront nier la plus-value qu’ils en tirent.

En effet, à côté du mako, — la seule qualité égyptienne, — le gallin n’est autre que le produit des graines abâtardies des Florides. Dans la province de Sharkie existe un petit village du nom de Gallin, ne produisant qu’une très minime quantité de coton et où sans doute le sea-island a été semé autrefois ; plusieurs villages de la même province et des provinces voisines possèdent également quelques graines de la même provenance, et fournissent au marché leur minime contingent de sea-island dégénéré. Quant à l’origine de la désignation, au lieu de la chercher dans le nom du village en question, on la trouvera plutôt dans la corruption franque de la classification indigène hàl-hàl, devenue hallin, gallin, et cette supposition est d’autant plus admissible que le g dans gallin se prononce comme l’h adouci. A part le lainage d’origine américaine, l’Égypte ne cultive donc qu’une seule espèce de coton, le mako ou jumel (gossypium arboreum Egyptii), arbuste plutôt annuel que bisannuel. On a de la peine à comprendre pourquoi les exportateurs donnent à l’article égyptien unique une foule de noms divers : coton blanc, beledi, ashmouni, etc. Ashmouni répond à mako de bonne et saine venue dans ses trois classifications indigènes, teinte riche voisine : de beurre frais, soie souple et longue, poids, spécifique léger. Quant à coton blanc et beledi (du pays), ces deux dénominations ne représentent qu’un choix moyen ou très inférieur, très bas du mako. Le redressement de cette erreur était d’autant plus urgent que l’industrie colonnière en Europe a eu plusieurs fois à souffrir de ces classifications abusives[1].

  1. Ce qui a pu ajouter à cette confusion, c’est que depuis quelques années des particuliers ont introduit clandestinement des semonces de coton américain dont le produit, inférieur au mako pour la longueur et la finesse de la fibre, possède cependant une blancheur et donne un rendement qui en justifieraient jusqu’à un certain point l’introduction, si le fait eut été rendu public, et si l’on avait évité les mélanges.