Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 7.djvu/888

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

river aux mêmes résultats avec les tarifs les plus bas. Là, l’action du gouvernement s’arrête, et il ne peut forcer les compagnies à appliquer le minimum des tarifs établis, ou à multiplier les trains. Aussi le fret par voie ferrée est-il exorbitant dans l’Inde, presque prohibitif pour certains articles, les charbons entre autres.

Le réseau primitif des chemins de fer indiens comprend neuf lignes principales, administrées par des compagnies avec garantie d’intérêt. La première, l’East Indian (l’Est-Indien), met en communication Calcutta et les plaines torrides du Pendjab[1] en passant par les grandes villes du Bengale et les provinces nord-ouest. La seconde, le Great Indian Peninsula (Grand-Péninsulaire indien), relie Bombay à Calcutta par sa jonction avec l’Est-Indien à Allahabad, et Bombay à Madras par sa jonction avec le chemin de fer de Madras à Kulburga. La troisième est le Madras railway (chemin de fer de Madras), dont les divers embranchemens unissent le Golfe-Arabique à la baie du Bengale, Madras au beau plateau des Neilgherries, et Madras au Grand-Péninsulaire indien. La quatrième, le Scinde, Punjab and Delhi, remédie aux difficultés de la navigation du Bas-Indus. Nommons encore le Bombay Baroda and central India, le Great Southern of India, l’Eastern Bengal, l’Oudh and Rohilkhund, enfin le chemin de fer du Carnatic, qui doit desservir Madras et Pondichéry. L’expérience a depuis lors révélé de nouveaux besoins, mais les lignes complémentaires qui sont venues se greffer sur le réseau primitif sont désormais construites par l’état et exclusivement sous son contrôle : ainsi le Calcutta and South-Eastern, le Northern Punjab, le Rajpootana, etc. Pendant l’année officielle 1871-1872 (1er avril à 31 mars), il a été livré à la circulation 408 milles de chemins de fer, et le total du réseau en activité a été ainsi porté à 5,204 milles, dont 5,136 milles relèvent des compagnies et 68 milles sont propriété de l’état. L’achèvement des travaux résolus comprend encore 2,440 milles, savoir : 940 milles par les compagnies et 1,513 milles par le gouvernement.

  1. La légende mahométane donne cette explication pittoresque des torréfiantes chaleurs du Pendjab : autrefois vivait à Moultan un saint homme du nom de Pir Schamsch, qui, tout entier à ses dévotions, mendiait ses repas aux âmes charitables lorsque les besoins de son estomac se faisaient sentir. Pris de faim un beau jour, il obtint une épaisse côtelette de la bienfaisance d’un boucher bon musulman. Pir Schamsch, son déjeuner à la main, alla immédiatement trouver un rôtisseur et le pria de la mettre sur le gril pour l’amour de Mahomet. Ce rôtisseur, homme de peu de foi, prit la côtelette et la jeta à la face de Pir Schamsch. Sans aucune pensée de vengeance, ce dernier ramassa humblement le morceau de viande, et, levant les yeux vers le soleil, le pria de lui rendre le petit service qu’un mécréant lui refusait. La réponse d’en haut ne se fit pas attendre ; l’astre du jour descendit immédiatement de trois degrés, position qu’il a conservée depuis, et grilla à point la côtelette de Pir Schamsch.