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des académies les unes avec les autres, voilà donc ce que nous voudrions, non pas seulement pour l’Institut de France, mais, selon le vœu de Bacon, pour toutes les grandes académies du monde civilisé, pour Londres, Vienne, Berlin, Saint-Pétersbourg, etc. Ne serait-il pas à souhaiter qu’elles fussent unies entre elles par des liens plus intimes et plus forts qu’un échange de mémoires et de comptes-rendus ou la nomination de loin en loin de quelque associé ou correspondant ? Pourquoi ne délégueraient-elles pas tour à tour dans chaque grande capitale quelques députés pour former un véritable concile œcuménique de la science où seraient discutées les questions qui divisent le monde savant ? « De même, dit encore Bacon, que le progrès des sciences dépend beaucoup de la sagesse du régime et des institutions des diverses académies, on aurait aussi de grandes facilités pour arriver à ce but, si les académies qui sont répandues en Europe contractaient entre elles l’union et l’amitié la plus étroite. » Il exhorte donc toutes les universités, tous les collèges du monde civilisé à s’unir par des relations régulières, à lier ensemble alliance et amitié[1].

C’est le besoin d’associer les recherches et les travaux pour l’avancement des sciences qui a donné naissance aux académies ; c’est le même besoin qui doit aboutir à l’association des académies les unes avec les autres. Le tort de M. Guizot et de ses successeurs est d’avoir voulu, par une pensée politique, les rattacher à leur ministère et non à l’Institut, qui, encore une fois, est leur centre naturel, qui seul a autorité pour faire cette alliance, comme ils sont obligés eux-mêmes de l’avouer, malgré la plus manifeste inconséquence. Nous faisons bon marché des voies et moyens que nous nous sommes borné à indiquer ; nous n’attachons d’importance qu’à l’idée fondamentale d’une association des académies de province avec celles de Paris, conformément aux anciennes traditions de la France académique et aux statuts de l’Institut de France. L’impulsion reçue de l’Institut, les sociétés affiliées la communiqueraient autour d’elles, dans tout leur diocèse académique. La vie intellectuelle de la province, les académies, les grandes universités, seraient plus efficacement excitées et encouragées en même temps que le rôle de l’Institut serait agrandi. Enfin la science elle-même tirerait sans nul doute quelque parti de ce concert tout à fait nouveau de recherches, d’observations, d’expériences.


FRANCISQUE BOUILLIER.

  1. Fin du second livre du De Augmentis scientiarum.