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Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 25.djvu/628

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ESQUISSES LITTÉRAIRES


UN CONTEUR MORALISTE. — P.-J. STAHL.


La critique était jadis la bête noire de messieurs les écrivains d’imagination, le bouc émissaire chargé d’expier tous les péchés du public, c’est-à-dire de payer pour tous les insuccès. Soit qu’elle ait été découragée par ces interminables récriminations, soit qu’elle ait fini par juger qu’elle constituait un métier dont le jeu ne valait pas la chandelle, elle a cessé depuis longtemps d’élever la voix, et l’on peut dire qu’aujourd’hui les œuvres littéraires réussissent ou tombent sans sa participation. Il n’y a plus de critique, au moins pour les œuvres courantes. Eh bien ! je demande à nos auteurs s’ils s’en trouvent mieux, et s’ils sont sûrs d’avoir plus gagné que perdu à ce silence. Que d’œuvres remarquables qui ne sont pas connues autant qu’elles le méritent, faute d’avoir été signalées en bon temps par quelque vigilante sentinelle du goût ! que de réputations qui restent au-dessous de ce qu’elles devraient être, faute d’un juge équitable qui ait pris à cœur de réparer une injustice ou un oubli ! Et ce n’est pas seulement sur les inconnus que frappent ces injustices et ces oublis, la notoriété même n’y échappe pas. Voyez, par exemple, l’écrivain dont il nous plaît de nous occuper aujourd’hui. Il édite de beaux livres et il en écrit de charmans, il est donc doublement connu du public parisien et n’a rien à désirer pour la notoriété ; a-t-il été cependant apprécié jusqu’ici à sa vraie valeur et classé à son véritable rang ? Sans doute plus d’un journal l’a salué à l’occasion du titre d’homme d’esprit et a recommandé ses productions, mais a-t-on bien dit que cet homme d’esprit était l’auteur de quelques-unes des plus heureuses nouvelles qu’on ait écrites de notre temps ? On l’a vanté comme éditeur