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tardivement. C’est ainsi qu’après un Christ bénissant les petits enfans, exécuté pour l’église de Brantham, il peignit encore en 1809 une Cène pour l’autel de la petite église de Nayland, à quelques milles de Dedham. A vrai dire, ce n’étaient là que des œuvres assez fades, faites à l’imitation de Benjamin West qui, avec sa bienveillance habituelle, avait procuré au jeune artiste des leçons et quelques commandes.

Mais de plus en plus, Constable se sentait attiré vers le paysage et il était pour toujours dégoûté des études à l’atelier. C’était devenu pour lui une souffrance de n’entendre parler que de tableaux, de procédés, de recettes « par des gens qui ne songeaient jamais à la nature. Toujours opposer, disait-il, des vieilles toiles, noires, enfumées et crasseuses aux œuvres de Dieu ! Toujours des ateliers, des galeries, des musées et jamais la création ! Voici deux ans que je perds à chercher de seconde main la vérité, en m’efforçant d’imiter les maîtres. Je retournerai à Bergholt ; j’y chercherai une manière simple de reproduire les motifs que j’aurai sous les yeux. Il y a peut-être place pour un peintre de la nature. »

On peut juger de son bonheur quand, se retrouvant dans son village natal, il put y mener enfin une vie de tous points conforme à ses goûts. Il revoyait les lieux où s’était écoulée son enfance et dont les plus humbles coins, en évoquant les souvenirs du passé, parlaient à son cœur. Infatigable à la besogne, ses journées s’écoulaient remplies par un travail opiniâtre. En 1799, il avait passé l’automne à Ipswich et, en 1800, dans le parc abandonné d’Helmingham. Comme enivré des beautés qui l’entouraient, il avait besoin d’épancher son enthousiasme dans une lettre adressée à son ami Dunthorne. « Je suis seul au milieu des chênes et des solitudes d’Helmingham. J’ai pris tranquillement possession du presbytère inhabité. Chaque jour, une femme venue de la ferme où je dîne fait mon lit. Le reste du temps, j’erre où il me plaît, parmi de beaux arbres de toute sorte. » Il était avide de s’instruire et ses études portaient successivement sur tous les élémens du paysage.

Le ciel, nous l’avons dit, avait été de bonne heure le sujet de ses observations. Il estimait que « la peinture d’un ciel est une difficulté qui passe tout le reste… Malgré tout son éclat, un ciel ne doit pas venir en avant ; il faut qu’il soit plus loin que les objets les plus éloignés… S’il est trop en relief, ainsi que sont