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saluait comme une victoire. L’opinion catholique avait fait acte de présence : on avait voté pour elle ou contre elle, et l’insuccès ne prouvait pas qu’elle aurait dû se taire, mais qu’elle avait à s’organiser.

L’organisation, le groupement local des catholiques en associations toutes ramifiées entre elles, formaient, depuis longtemps déjà, l’objet des rêves de Buss. Un instant, en 1844, en voyant deux fonctionnaires catholiques, Mone et Lender, élaborer, avec l’approbation de l’archevêque Vicari, les statuts d’une association, ses rêves avaient pris consistance : il songeait à créer, dans tout le pays, des associations (Vereine), semblables à celles dont l’année 1848 couvrira soudainement toute l’Allemagne. Mais le professeur Hirscher, justement respecté par l’élite du clergé, avait contre ce genre de fondations une hostilité notoire, dont nous étudierons plus tard, en ses écrits de l’année 1849, la retentissante expression : Buss, provisoirement, dut abdiquer son dessein ; et tout de suite, sans découragement, étalant sa solitaire mais puissante carrure dans cette avant-scène qu’était le Parlement de Carlsruhe, il empêcha, du moins, que, sur le théâtre politique badois, la question religieuse disparût de l’affiche.

D’Andlau à la première Chambre, Buss à la seconde, se partagèrent les rôles. Le premier, en juillet 1846, demandait que les trente-neuf articles fussent supprimés ; que l’organisation de l’église badoise fût mise d’accord avec le droit canon, que les prérogatives du clergé catholique en matière scolaire fussent protégées et développées, et que les petits séminaires fonctionnassent sous la direction de l’archevêque avec l’aide pécuniaire de l’Etat. Le second, en septembre, réclamait que l’Etat fit de toutes les questions religieuses pendantes l’objet d’un traité d’entente avec l’archevêque et biffât d’un trait de plume toutes les lois qui gênaient l’Eglise ; et par cette motion, qui fut unanimement repoussée, Buss se distinguait à la fois, et des bureaucrates qui voulaient que l’Etat continuât de régner sur l’Eglise, et des radicaux qui voulaient séparer l’Église d’avec l’Etat. Le débat qui se déroulait à Carlsruhe était comme un prologue des discussions qui, deux ans plus tard, occuperont le Parlement de Francfort ; à Francfort comme à Carlsruhe, il y aura un parti radical, jaloux d’obtenir de l’Etat une déclaration d’indifférence religieuse absolue, et de ménager par là même toute liberté aux sectes religieuses nouvelles, sous le Credo