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Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 46.djvu/119

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acte de gouvernement fut de condamner la régente à mourir de faim.

Cependant les Mahrattes de Sivadji voyaient décliner leur puissance dans le Sud de la péninsule. La ruine de ces « ennemis invétérés de toute autorité établie » suivit d’assez près celle des dynasties de Golconde et de Bijapour. Alliée avec la première, Sivadji avait réussi, deux ans avant sa mort, à se rendre maître de Genji, par un compromis avec le gouverneur musulman, en 1677. Mais Aureng-Zeb approchait. Quand il eut détruit la dynastie d’Adel en 1686, et celle de Koutoub en 1687, le vieil empereur s’occupa des Mahrattes, et si bien qu’en l’année de sa mort (1707) les cavaliers de Pounah étaient refoulés le long de la côte occidentale.

Le régent des Mahrattes, Ram Raja, fut investi dans Genji par l’Empereur en personne (1693), puis par ses lieutenans. La tradition veut que Ram Raja ait résisté pendant sept années. Je vous ai dit comment il s’enfuit à Vellore après la prise de Genji. Puis des accords survinrent, et les gouverneurs des forteresses du Deccan et du Carnate reconnurent l’autorité du Mogol. Peu importait aux faibles successeurs d’Aureng-Zeb que ces forteresses fussent tenues par des radjpoutes ou de ? gens de Golconde, pourvu qu’ils payassent le tribut entre les mains des Nawabs établis par les vice-rois. Le prestige de l’autorité impériale était ainsi sauvegardé, sans que l’anarchie cessât de régner dans la péninsule. Bientôt, avec Dupleix, les Français commenceront de se mêler aux intrigues et aux conspirations ourdies contre les fantômes impériaux de Delhi A nouveau les cavaliers de Pounah inondent le Deccan et le Carnate, et les radjjoutes qui les ont appelés se disputent les châteaux et les villes. Des usurpateurs, des prétendans, des chefs de bandes, l’énumération défie tout calcul. C’est un désordre sauvage où les deux Compagnies des Indes, l’anglaise et la française, s’embusquent pour pêcher en eau trouble. L’importance fabuleuse des contributions, des rançons, le produit des pillages se chiffre, au vrai, par milliards. Il semble que les richesses du Nouveau Monde aient été pauvreté auprès de ces trésors des Nababs qui, en moins d’un siècle, prirent le chemin de l’Europe. La sauvagerie des procès que l’on fit, à Paris et à Londres, aux hommes qui drainèrent ainsi l’épargne millénaire de l’Inde, s’explique aisément. Il y a toujours des consciences courageuses