Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 46.djvu/273

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

homme, dévoué à son pays et aimé de son pays. Cependant il ne faudrait pas croire que la Belgique est dans son âge d’or ; ici, les questions politiques sont secondaires, mais les passions religieuses sont extrêmement vives. Il y a même des gens qui prétendent qu’un jour ou l’autre elles mettront le pays en feu. Sommes-nous très aimés dans ce pays qui nous ressemble comme un frère cadet ? Par politesse, on dit que oui. Les Belges sont en effet de ceux qui ont pour nous le plus de sympathie, ayant avec nous le plus de ressemblance ; mais ils disent qu’après la dernière guerre, nous nous sommes montres des ingrats. Leurs femmes ont été, paraît-il, d’un dévouement parfait pour nos pauvres soldats réfugiés et nous les aurions appelées des poseuses d’emplâtres. Ce mot célèbre, on me l’a déjà répété bien des fois, et, s’il est exact, ce n’est pas joli.

... Adieu, chère, je vais retourner à la cathédrale, où je suis vainement allé hier quatre fois, pour revoir le Van Eyck. Tu n’as pas idée des habitudes adoptées dans ces églises des Flandres, et du trafic qu’ils font avec leurs tableaux voilés, comme ils disent. Ma parole d’honneur, la sacristie est dégoûtante, on peut bien penser cela sans manquer de respect à l’Evangile...

Je suis allé à la cathédrale : impossible. J’y retourne. C’est à crever de rire. Et si tu voyais la tête du sacristain !...


A la même.


Bruxelles, mardi matin, 27 juillet 1875.

... Avant tout, avant d’écrire le premier mot de mes notes, si j’en viens là, il faut que je connaisse à peu près bien mon histoire de ces deux pays. Il est impossible de parler des hommes et de les bien comprendre, de les bien définir, eux et leur talent, si l’on ne voit pas nettement le milieu moral, politique, social, contemporain. Il est également indispensable de savoir synchroniquement ce qu’on faisait en Italie à la même époque, en France, et, depuis Philippe II, en Espagne.

Les artistes flamands et hollandais, sauf Rembrandt et quelques-uns, ont été de grands promeneurs. La manie de l’Italie les avait tous plus ou moins saisis. Ils allaient en Espagne, en Angleterre, et c’est de ces relations continuelles que sont nées les différences et les altérations qu’on remarque dans leur école.