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des déceptions et aussi des admirations très vives. Rubens grandit à chaque pas qu’on fait dans ce pays, dont il est la plus incontestable gloire et où il règne souverainement. Rembrandt ne grandit pas, quoi qu’on en dise, et, à part quelques morceaux admirables dont on parle moins que des fameux, il étonne, me choque un peu, m’attache et ne me convainc pas. Voilà les deux grands noms, en y ajoutant Van Eyck et Memling, qui, à leur date, et le second surtout, sont deux génies.

Ruysdaël, Cuyp et Paul Potter y sont ce que nous les savons, les premiers dans leur genre. Ruysdaël surtout, par des œuvres plus inattendues et de toute beauté, s’y classe hors ligne, au rang qu’il doit occuper : le premier paysagiste du monde, avec, et peut-être avant Claude Lorrain. Il n’y a plus ici d’Hobbema qui tienne. Hals y est inédit et tout à fait exquis. Quant à la petite charmante et fourmillante École hollandaise, on la juge à Paris presque aussi bien que sur place, avec cette différence que, ici, les degrés, les rangs s’établissent d’une façon plus nette, et que tel homme, par exemple Van de Velde, que nous serions tentés de mettre au premier, ne vient qu’à peine au second, et encore !

J’ai aperçu la campagne plutôt que je ne l’ai visitée, mais je la connais et je la sais bien. J’ai passé ma vie dans les églises, les musées et les collections particulières, et je puis dire que j’y ai beaucoup, mais beaucoup travaillé. D’un voyage de repos, j’ai fait, je m’en doutais, un voyage de pur travail ; mais ce travail, d’un genre tout nouveau, m’a distrait et reposé, ce qui est l’essentiel.

En ferai-je de meilleure peinture ? Je ne le crois nullement ; mais j’aurai appris et je connaîtrai à fond certaines parties de notre histoire de l’art, que je me reprochais d’ignorer.

Bien entendu, je ne rapporte rien, sinon des notes abondantes.

Ferai-je quelque chose avec ces notes et mes souvenirs ? Je le désire et je le crois. Quand ? Comment ? Sous quelle forme ? Je verrai cela pendant mes vacances.

Mais certainement, après les critiques, après les historiens, même après les historiens locaux, dont j’ai lu quelques-uns, il y a presque tout à dire, non pas sur la vie des hommes, qui est maintenant très bien et très finement étudiée, mais sur la nature, la qualité et la portée de leur talent. Il y a tant d’erreurs et de préjugés !…