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appuyé par les princes, reconstituerait cette unité plus vite et plus sûrement que ne le pourrait faire un pape fugitif, dépossédé de son domaine temporel. Le souverain régnant, Jean Paléologue II, était entré déjà en négociations avec le Pape. Il n’en accueillit pas moins les délégués de Bâle avec une bonne grâce particulière, espérant qu’à la faveur des dissentimens survenus entre eux et le Saint-Siège, il dirigerait les événemens. Le Saint-Siège insistait pour que le Concile se réunît à Constantinople, tandis que les délégués voulaient qu’il restât sur les bords du Rhin, où, pour mettre un terme à ce conflit, Jean se décida à envoyer des ambassadeurs.

Parmi eux, se trouvait un moine : Isidore, plus tard le cardinal Isidore, qui était alors hégoumène du monastère de Saint-Démétrius. Quoique féru d’humanisme, sa vie sacerdotale, la pureté de ses mœurs et sa piété témoignaient de la foi la plus vive et d’une grande noblesse d’âme. Son influence ne tarda pas à s’exercer sur les évêques réunis à Bâle et, conformément aux instructions de son souverain comme à ses propres sentimens, ce fut dans un sens favorable à la réunion des églises grecque et latine sous l’autorité du Pape. D’accord avec le cardinal Giuliano Cesarini qui présidait le Concile, il proclama qu’il fallait que Byzance s’unît à Rome : les causes de la rupture étaient trop futiles pour ne pas disparaître ; avec un peu de bon vouloir, on en aurait raison. Dans des discours pompeux et fleuris, où se trahissent à la fois le croyant et le patriote et où, pour démontrer les fâcheuses conséquences des discordes, il remontait jusqu’à la guerre de Troie, Isidore s’écriait que réaliser l’union entre les deux églises, ce serait élever un monument grandiose « qui rivaliserait avec le colosse de Rhodes, dont le sommet atteindrait les cieux et dont l’éclat rejaillirait sur l’Orient et l’Occident. » Ce fut bientôt l’avis de l’assemblée de Bâle. Elle reconnut en même temps qu’elle n’était pas suffisamment qualifiée pour mener à bonne fin une tâche aussi considérable ; qu’il y fallait un concile général.

Ce principe admis, restait à décider où se réunirait ce concile : les Latins tenaient pour Bâle, les Grecs pour Constantinople. Cette divergence d’opinions donna lieu à de longs débats. Enfin, les Grecs furent battus sans que les Latins eussent victoire complète. Il fut résolu que le Concile se tiendrait dans une ville plus voisine de l’Orient que ne l’était Bâle ; mais on ne la désigna pas. elle ne l’était pas encore quand le pape Eugène approuva les résolutions qui venaient d’être prises et quand l’empereur byzantin, à qui ses envoyés, revenus à Constantinople, les avaient fait connaître, y donna son agrément.