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Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 46.djvu/916

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pour être vraisemblablement garanti contre toute perte. Comme les certificats des chambres de compensation ne sont émis qu’en temps de crise, à des époques où les valeurs ont déjà baissé, la marge d’un quart, d’un tiers, parfois davantage qu’exigent les comités de prêts, est amplement suffisante pour que les détenteurs des certificats soient assurés de retrouver toujours, par la vente du gage, le montant de leur créance. Il semble donc que nous soyons ici en présence d’un mode nouveau de paiement, germe possible d’une évolution économique. Elle ne serait d’ailleurs que la conséquence du développement pris par les valeurs mobilières, dans lesquelles s’incarne une partie considérable de la fortune publique et que leur facilité de réalisation rapproche de la monnaie. Augmenter encore leur mobilité en les transformant pour ainsi dire en monnaie grâce à l’émission de certificats gagés par elles, est une idée qui devait se présenter : elle a été adoptée et appliquée par les Américains, qui trouvent là un moyen de remédier à la rareté de numéraire qui est l’un des signes et des dangers des crises.

De quelque façon d’ailleurs que l’on envisage la question, on ne peut pas ne pas être frappé à la fois de l’importance toujours croissante prise par le côté monétaire et des efforts de plus en plus heureux faits par les communautés financières pour se dégager de l’étreinte violente qui les saisit à l’heure du retour plus ou moins périodique des momens difficiles. Ce qui s’est passé aux États-Unis en 1907 est instructif à cet égard. La disette de monnaie qui s’y est fait sentir a eu son origine dans la disproportion entre les besoins de capitaux de l’industrie et les ressources disponibles de la nation, si énormes que fussent ces dernières. Mais lorsque cette rareté atteignit son point le plus élevé, les demandes avaient déjà diminué, et ce fut la crainte du péril et des conséquences des difficultés où se trouvaient maintes entreprises qui retirèrent du marché, comme par enchantement, une grande partie des ressources monétaires dont il était pourvu. La panique fit son œuvre ; banquiers, négocians, industriels, particuliers, tous s’efforcèrent à l’envi de mettre de côté des pièces d’or et d’argent et des billets de banque, de façon à ne pas être pris au dépourvu et à ne pas dépendre de la bonne volonté de l’établissement chez lequel leurs fonds étaient déposés. Auparavant l’argent était rare et cher ; maintenant il disparaissait en dépit des millions d’or qui arrivaient chaque jour