Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 6.djvu/727

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à 8 h. 50. A la gare, je rencontrerai Bargoni, qui me remettra ta lettre.

Le Roi m’a fait appeler, et je suis resté longtemps avec lui… Il n’a nul espoir d’une combinaison pouvant résulter de la présente guerre d’Orient. Il croit, lui aussi, qu’il est trop tard, et qu’il n’y a plus là de place à prendre pour nous. Toutefois, il me recommande de faire tout le possible pour nous permettre d’entrer dans l’affaire avec quelque profit. Son langage a été tout différent pour l’autre tentative, celle qui constitue l’objet véritable de mon voyage. Le Roi sent vivement le besoin de couronner sa carrière par une victoire pouvant donner à notre armée la force et le prestige qui lui manquent aux yeux du monde. C’est là un langage de soldat, et je le comprends. Le même désir enflammait notre pauvre Bixio, mort si misérablement sans avoir pu combattre une dernière fois pour la gloire de notre pays !

J’ajouterai que le Roi a pleinement raison. Si, en 1866, les généraux ne nous avaient pas manqué, et si nous avions été victorieux en Vénétie et sur l’Adriatique, les Autrichiens n’oseraient pas parler et écrire de nous comme ils le font. L’armée italienne aurait en Europe l’autorité qui présentement lui fait défaut, et la parole de l’Italie revêtirait une importance plus grande auprès des divers Cabinets.

Efforçons-nous donc, s’il est possible, de combler cette lacune ; et, puisque nous nous croyons de bons diplomates, faisons-nous valoir afin que notre patrie puisse prouver, à ceux qui ne la respectent pas suffisamment, qu’elle est quelque chose dans le monde.

Je t’écrirai aussitôt que je pourrai te donner des nouvelles de Paris… Ton tout dévoué.

F. CRISPI.

Le soir à 8 h. 50, je pars pour Paris, après avoir reçu la lettre suivante de Depretis.

PRÉSIDENCE DU CONSEIL DES MINISTRES


Rome, 27 août 1817.

Excellence,

J’ai fait connaître à S. M. que Votre Excellence aviez la bonté d’accepter la mission qui vous était confiée par le ministère, et dont