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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 51.djvu/222

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REVUE DES DEUX MONDES.

création de ce qui est la pensée ? A-t-elle expliqué le passage d’une espèce végétale à une espèce animale ? Et a-t-elle expliqué le passage du minéral au végétal ? Eût-elle expliqué tout cela, il lui faudrait encore expliquer la naissance de la première cellule. Cette besogne terminée, l’hypothèse darwinienne aurait véritablement le droit de régner sur sa conquête universelle. Autrement non.

Cette immense besogne n’est pas terminée : en quelque sorte, elle n’est pas commencée. Certes, on a beaucoup travaillé ; mais en vain.

Pour devenir philosophie générale, le darwinisme doit aboutir au monisme. Or, le monisme a besoin de la génération spontanée, sans quoi la première cellule demeure un mystère absolu, un mystère qui se répand jusqu’aux dernières extrémités de la doctrine : « il est impossible de concevoir l’évolution générale comme loi de l’univers sans la génération spontanée. » Mais, dans l’état actuel de la science, est-il possible d’admettre la génération spontanée ? La science nie la génération spontanée : peut-être y a-t-il peu de problèmes où la science contemporaine soit aussi nettement affirmative, depuis Pasteur qu’on n’a point démenti. Alors, que faire ? « Dire que la science nie la génération spontanée, c’est dire que la science répudie toute la théorie évolutioniste, transformiste et moniste. » Consultons les néo-darwiniens et monistes. Hæckel avoue que « jusqu’à présent » aucune génération spontanée n’a été vue. C’est ennuyeux. Mais on n’a pas démontré, dit Hæckel, que ce phénomène fût impossible. « Voilà un raisonnement peu scientifique, » répond le professeur Grasset. Spencer avoue que l’idée de spontanéité est incompatible avec l’idée d’évolution. Alors ? Il nie « le commencement absolu de la vie organique sur le globe. » Le professeur Grasset répond : « L’affirmation de l’évolution universelle entraîne nécessairement, autrefois et aujourd’hui, le passage de l’inorganique au vivant. Dans la série, il y a donc bien un commencement du vivant Or, scientifiquement, il est impossible de concevoir ce passage. Donc, à ce point de vue, non seulement l’évolutionisme n’est pas démontré par la science, mais encore il est démenti et déclaré impossible par elle. » Le Dantec, lui, consent que le néo-darwinisme a besoin de la génération spontanée. Alors ? Il admet la génération spontanée. Contre la science ? Mais oui, contre la science actuelle, qui n’a pas encore su montrer un seul fait de génération spontanée. Le Dantec se fie à la science future, qui prouvera la spontanéité. Qui la prouvera ? Mais oui ! puisque le néo-darwinisme a besoin de la spontanéité, le néo-darwinisme qui est la vérité !…