Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 51.djvu/649

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’Estaires. La dernière colonne, celle que commandait le général von Stetten, représentant le pouce, devait d’abord serrer derrière la colonne Carlowitz, puis se déployer face à droite et faire conversion au Nord, en direction de Fleurbaix, débordant ainsi Bois-Grenier et Armentières par le Sud. Tout cet ingénieux mécanisme fonctionna à merveille, avec une virtuosité impeccable. Le lendemain, pendant que la VIe armée opérait le passage de la Lys, la IVe, celle du général Sixt von Arnim, prolongeait l’action au Nord, entre Armentières et Ploogstaert, pour étendre le front de bataille et prévenir l’arrivée des réserves anglaises qui pouvaient s’opposer au passage de la rivière. Trois nouveaux corps d’armée, les groupements Eberhardt, Marschall et Siéger, participaient à cette attaque. C’est le poing droit qui s’abattait après le gauche. Armentières, débordée par le Nord et le Sud, noyée de gaz, écrasée d’obus, devenait intenable et tombait le 11 avril. Ce même jour, les Allemands à leur gauche enlèvent Neuf Berquin et Merville, à leur droite Nieppe et Steenwerck. Le lendemain, ils prennent Calonne et viennent border les lisières de la forêt de Nieppe, tandis que par leur droite ils marchent sur Bailleul, dont Quast emportait les premières défenses. Le 14, Eberhard et Marshall attaquent par l’Est et s’emparent de la crête de Wylschaete. Le 15, après de durs combats, les Allemands complètent ce succès en prenant les gros points d’appui de Meteren et de Bailleul. Ils avaient, en six jours, avancé de vingt-cinq kilomètres en profondeur, creusé dans les lignes alliées une poche dangereuse, qui mettait dans une situation très fragile le saillant d’Ypres, au point que les Anglais, dès le 13 avril, se voient contraints, pour ne pas demeurer trop en flèche, de rectifier leur front et d’en évacuer une partie. Ils avaient pris 400 canons, des milliers de mitrailleuses, un matériel immense, des approvisionnements de toute sorte (valant plus d’un milliard) et 20 000 prisonniers.

Dans ces limites, l’opération était une très belle affaire. Elle rapportait un succès éclatant, un gain de terrain considérable, un affaiblissement sensible des forces britanniques. L’armée allemande, en quelques jours, venait de reprendre aux Anglais beaucoup plus que ceux-ci n’avaient réussi à leur arracher l’année précédente on cinq mois de batailles acharnées dans les Flandres. Ce nouveau coup, suivant de si près celui du