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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 51.djvu/662

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Mais les Allemands n’ont pas coutume de s’arrêter à moitié. Leur succès même a eu l’effet de les placer dans une impasse, d’où il leur faut maintenant sortir absolument. La possession des monts leur est d’autant plus nécessaire qu’ils se heurtent, le même jour, au Sud du champ de bataille, à la résistance inflexible de la division Strickland (1re division britannique). Ils décident donc de faire un effort violent et d’emporter les monts de force, en y mettant le prix et en prenant le taureau par les cornes.

Du côté de l’Est, la chaîne des monts de Flandre se termine par un gros massif qui domine tout le pays et que, par les temps clairs, on aperçoit d’aussi loin que de Bray-dunes ou des Moëres, par-dessus l’immense étendue de la plaine du Nord : c’est le Kemmel. Quand on l’aborde du côté de l’Ouest, en arrivant par le couloir où se trouve le village de Locre, on aperçoit une large pyramide tronquée, s’élevant en pentes douces avec la molle inclinaison des flancs d’un tas de sable, et que surmonte une dalle plate, une table calcaire de sept à huit cents mètres. Ce plateau supérieur est formé en réalité de deux sommets : celui du Nord culmine à 152 mètres, au cabaret de Bellevue ; le second, au Sud-Ouest, n’atteint que 130 mètres : c’est le petit Kemmel. Au Nord-Est du sommet et au pied de la pente de sable, le village de Kemmel flanque la position. Tout le massif est entouré de ruisseaux qui découlent des monts et l’isolent par le pied comme une île. Le principal coule au Sud du Kemmel ; c’est un affluent de la Lys, où il se jette à Warneton, et qui sépare le Kemmel de la crête de Bailleul. On l’appelle la Douve. La Douve reçoit à son tour quelques ruisseaux secondaires qui descendent des pentes du Kemmel : le plus important pour l’histoire de la bataille est celui qui sépare le Kemmel du Mont Rouge, et qu’on appelle le Hellebeek. C’est là que se trouve le village de Locre, qui forme le réduit de toute la position. Sur ce versant, les flancs du Kemmel sont assez étroits et même profondément ravinés à la base ; du côté de l’Est, au contraire, ils se continuent par un glacis, qui court d’Ouest en Est le long de la vallée de la Douve et se relie, à une lieue plus loin, à la crête de Wytschaete-Messines. On sait que cette crête est un des mouvements de terrain, une « les deux houles contraires qui rident la plaine flamande et qui entourent Ypres d’une faucille de collines.