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équivalente. En outre, on s’était décidé, sur les instances du Haut Commandement, à hâter la construction de ces chars légers dont l’influence se fera sentir dans les opérations offensives de 1918.

En résumé, le Commandement français est d’avis de retarder la bataille décisive jusqu’au moment où la soudure se fera avec les Américains, où les progrès de notre artillerie seront accomplis, où notre infanterie sera pourvue de ses chars d’accompagnement. Jusque-là, il convient de se borner à des actions de petite envergure, dans lesquelles l’artillerie jouera le rôle principal, afin de ménager l’infanterie et de lui procurer des succès faciles, pour qu’elle reprenne une confiance en elle-même que nos attaques du printemps ont ébranlée.


Nous attendrons donc, il le faut. Mais, dès le lendemain du 16 avril, et grâce à l’expérience, si incomplète qu’elle ait été, du 16 avril, les grands chefs savent déjà ce secret que, malgré les apparences, les jours de la guerre de position sont désormais comptés ; que la formule de la bataille de rupture est d’ores et déjà trouvée ; que toutes choses sont presque au point, du moins dans l’ordre de la doctrine et de la technique, pour que la grande transformation puisse s’accomplir ; et chacune des opérations nouvelles qui se succèdent en 1917 confirme davantage cette prévision. Voyons comment.

On n’en est plus, comme au temps de la bataille de la Somme, à considérer comme nécessaire dans une opération offensive la destruction totale, ou presque totale, par l’artillerie, des organisations défensives de l’ennemi. Si le principe demeure acquis que l’action d’artillerie est la trame même de la bataille, on ne dit plus en 1917 que « l’artillerie conquiert le terrain ; » on dit seulement qu’elle « ouvre la voie » à l’infanterie, et la formule qui se lit dans toutes les Instructions nouvelles est celle-ci : « L’infanterie conquiert le terrain, le nettoie, l’occupe, l’organise et le conserve. » La doctrine est désormais qu’elle doit rompre les organisations défensives de l’ennemi, puis progresser au-delà.

C’est qu’elle est devenue de plus en plus capable de cette double tâche, depuis qu’on a pris l’habitude, avant chaque opération, d’entraîner la troupe, surtout les unités spéciales de