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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 51.djvu/962

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ne pas Le lâcher, quitte à trouver ensuite des suppléments, des dédommagements, des fiches de consolation : l’Autriche défaite et l’Orient bouleversé n’étaient pas sans en présenter. Si, par hasard, toute combinaison échouant, il fallait à la fin y revenir, comptons les peines perdues, le temps gaspillé, et les épines ajoutées au fagot !

Pourtant, de quelque côté qu’on aborde la situation, elle en est assez hérissée, au dedans et au dehors. Il semble qu’on aperçoive une petite éclaircie en Russie, où se l’orme et lentement, se développe, sous la direction de l’amiral Koltchak, un embryon d’État organisé que les Puissances alliées et associées, après de trop longues hésitations, se disposent à reconnaître. La bête bolcheviste a du plomb dans l’aile, mais elle se débat. Et l’Allemagne, qui tirait les ficelles, en guide apparemment les convulsions. Avec cette espèce d’impudence qui est un des traits de son caractère, M. Erzberger confiait récemment au correspondant d’un journal de Chicago son dessein et ses espérances. « À cette heure, disait-il, se remuent en France des influences très fortes. » Heureusement, sans que nous l’ayons provoquée, la proclamation de la République rhénane est venue à point nommé fournir le révulsif ou l’antidote. Mais méditons sur cet aveu, dépouillé d’artifice, devant de prétendus phénomènes sociaux qui n’ont pas en eux-mêmes d’explication suffisante, et dont la concordance avec le projet de reconnaissance de l’amiral Koltchak par l’Entente autant qu’avec la signature de la paix par l’Allemagne est, qu’il s’agisse de dupes ou de complices, au moins suspecte.

Tout cela, au dedans d’abord, est sérieux, mais peut encore n’être pas très grave, s’il y a un gouvernement.


CHARLES BENOIST.

Le Directeur-gérant : RENE DOUMIC