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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/409

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et de Rœchling se sont établies au Sud de Thionville, sur la Moselle.


II. — LE CHARBON ET LES USINES DE LA SARRE

Si les minerais de fer d’Alsace-Lorraine vont nous apporter un accroissement de richesse considérable et un précieux instrument de paix, les charbons de la Sarre représentent pour nous beaucoup plus encore, la satisfaction partielle d’une très impérieuse nécessité. Là encore, je retrouve une question dont j’ai déjà eu l’occasion de montrer ici l’importance patriotique à une époque où elle paraissait être un peu trop ignorée [1]. J’ai essayé de faire voir, en 1915, comment le Bassin de la Sarre, vieille région française arrachée à notre pays exactement un siècle auparavant, nous était indispensable pour remédier en partie à notre malheureuse disette de charbon, que le retour de l’Alsace-Lorraine, avec sa sidérurgie et ses tissages, va encore accroître. Depuis les heures sombres où j’écrivais alors que la récupération de la Sarre devait être notre delenda Carthago, l’idée a fait son chemin et, malgré les dures restrictions que nous a imposées la diplomatie américaine, nous occupons aujourd’hui la Sarre comme le reste de l’Alsace-Lorraine, à laquelle ce bassin houiller se rattache naturellement et historiquement. Ce n’est pas une raison parce qu’un rapt est plus ancien pour qu’il soit devenu plus légitime. De tels crimes ne sont jamais couverts par la prescription.

Il convient, d’ailleurs, de ne pas attacher grande importance aux déclamations des publicistes allemands qui trouvent là un prétexte à se déchaîner contre notre « impérialisme annexionniste, » — ce qu’il leur est plus scabreux de tenter pour Thionville. — La blessure dont ils se plaignent si bruyamment leur est, en réalité, beaucoup moins sensible que la perte des minerais de fer annexés et même que la désillusion de ne pouvoir nous ravir les minerais qui nous restaient. Je crois avoir, en effet, assez expliqué que l’Allemagne va manquer de fer, tandis que, sans la Sarre, elle regorgera encore de charbon. La Sarre venait simplement ajouter sa production de 17 millions de

  1. Voyez la Revue du 1er septembre 1915. Voir, sur l’histoire de la Sarre, le beau livre de M. Babelon, Sarrelouis et Sarrebrück, 1918, et son article sur Sarrebrück et la diplomatie prussienne en 1815, dans la Revue du 15 juin 1918.