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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/627

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pectifs. À Klein et Groot-Labeur, ils avaient du moins la surprise de trouver les fermes « complètement transformées : » lits de camp « en bois et paille, » comme à Galimard, tables, bancs, avec un bon « jus » servi chaud, qui fut prestement « englouti. » L’alarme était passée. On n’évoquait plu« le péril que pour en rire. La scie du jour était : « Torpille à droite ! Torpille à gauohe ! Torpille partout ! Sauve qui peut ! » On rappelait l’attitude comique ou affolée de tel ou tel : c’est Frouin, de la 2e escouade, au cri de : « Torpille droit devant, sauvez-vous ! » dégringolant de son poste d’observation et s’étalant avec la caisse de grenades ; c’est un autre de ses camarades « jouant à cache-cache » avec les « barils de choucroute » derrière le pare-éclats ; un troisième renversé sur le dos et ramant des bras et des jambes « d’une façon impayable sous le courant d’air d’une torpille ; » un quatrième enfin allant « s’aplatir » comme une crêpe, avec le capitaine, « contre la soute aux munitions. »

Mais, si l’on riait en ce moment, il n’en avait pas été de même pendant la danse, où l’énervement, la colère des hommes crispaient âprement leurs mâchoires qui ne se détendaient que pour lâcher à l’adresse des Boches quelque épithète zoologique. Certains de ces hommes étaient pourtant de vieux briscards ; ils croyaient tout connaître de la guerre, en avoir épuisé toutes les horreur » : « J’ai vu un bombardement violent le 10 novembre, écrira le lendemain Luc Platt, un sérieux le 9 mai, j’en ai vu un terrible hier : il n’a duré qu’une heure, mais tous nous avions fait le sacriiice suprême, nous avions dit : « c’est fini ! »


x. — la dislocation de la brigade

Fini !… Le mot, ici, pouvait être pris dans les deux sens. Les dernières heures de la brigade étaient venues. L’amiral Lacaze avait remplacé au ministère de la marine M. Augagneur : il est rare qu’un ministre accepte autrement que sous bénéfice d’inventaire l’héritage de son prédécesseur et n’en répudie pas au moins quelque clause. À quoi répondraient sans cela les changements de cabinet ? La guerre maritime, jusque la guerre d’escadre, prenait une tournure inattendue avec l’entrée en scène des submersibles allemands. Pour lutter efficacement contre cette « poussière sous-marine, » il allait falloir faire