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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 54.djvu/854

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spartacistes, aussi calmes, aussi ordonnés, aussi silencieux sous leurs bannières rouges. A plusieurs reprises eurent lieu des contacts, des marches parallèles des deux partis. Ils ne donnèrent lieu à aucun trouble, bien que, civils comme soldats, beaucoup fussent armés. Jamais la discipline que ce peuple a dans le sang, ne se manifesta de façon plus caractéristique.

L’accalmie ne devait pas durer. L’affaire du 24 décembre n’avait été que le prologue : le vrai drame allait commencer.

Le préfet de police Eichhorn était nettement favorable aux spartacistes. Il n’appliquait pas les prescriptions du Gouvernement. Révoqué, il refusa de se démettre, se fortifia dans sa préfecture et s’entoura d’une garde de marins. Le 6 janvier, les troupes passées aux révolutionnaires envahirent les immeubles des principaux journaux et les fonctionnaires que le Gouvernement y avait placées firent cause commune avec les assaillants.

La lutte devint générale dans la journée du 7. Le Q. G. révolutionnaire était au Château royal, que les marins avaient choisi pour résidence dès les premiers jours de la révolution et d’où jamais on n’avait réussi à les faire partir ; celui du Gouvernement était au Ministère des Affaires Etrangères. Les révolutionnaires tenaient les principaux établissements, la poste, le Ministère de la Guerre. Toute la journée on se fusilla et se mitrailla. Le soir, l’îlot gouvernemental était fortement réduit.

Le Directoire avait cependant des troupes. Mais il n’osait les employer, ou plutôt, plein du souci d’éviter l’effusion du sang, il ne voulait pas les employer convenablement. Comme dans les mouvements antérieurs, les choses se passaient invariablement ainsi : la troupe, occupant un poste important, voyait les insurgés arriver. Elle était disposée à se défendre ; mais on lui envoyait des parlementaires. Elle les accueillait et, après échange de discours, elle fléchissait et capitulait. Le système des soviets de faire marcher la propagande à l’avant-garde, produirait des résultats merveilleux.

Le 8, la lutte se concentra dans l’avenue Unter den Linden, et ses abords. La porte de Brandebourg était occupée par des mitrailleuses placées sur son faite, entre les jambes des chevaux du quadrige de la victoire. La fusillade était incessante, mais on n’employait pas le canon.

Ce n’est guère que le 9 que le Gouvernement se décida à agir sérieusement. Les armées avaient envoyé des éléments