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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 54.djvu/876

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que choisit cette race de proie, et le contraire serait fort surprenant, ce sera un rapace du même genre.

Et sous la conduite de ce nouveau seigneur de la guerre, avec l’instrument qu’a préparé Noske, rejeté alors lui-même par ceux dont il ne fut que le paravent méprisé, instrument que des successeurs auront perfectionné, malgré tous les contrôles sans moyen et sans sanction du Conseil des Nations, la Prusse reprendra sa mission de conquête.

Et malheur à ceux de ses voisins qui n’auront pas suivi ces transformations, qui, lassés par les efforts gigantesques de ces dernières années, épuisés par leurs pertes, mal remis de leurs souffrances, absorbés par les luttes politiques et économiques intestines, n’auront pas tenu leur poudre mouillée, puisque telle est la nouvelle recette ! Commenceront-ils, les Prussiens, par la Pologne, ou par les Tchèques, où leurs nombreux congénères auront entretenu le désordre et préparé l’intervention ? Ayant, par l’annexion fatale de l’Autriche, retrouvé une frontière commune avec l’Italie, l’attrait magique de ce beau pays les engagera-t-il à renouveler leurs entreprises séculaires dans la vallée du Pô, sans avoir attendu d’avoir satisfait d’abord leurs rancunes plus directes ? Est-ce le Rhin qui verra de nouveau leurs hordes s’épancher au delà de ses bords occidentaux ? C’est le secret du destin, cela dépend des résistances possibles de l’adversaire à choisir.

Quoi qu’il en soit, tous ceux, et ils sont nombreux, que vise l’ambition teutonique, n’en trouveront jamais les bornes. Refrénée momentanément, nous risquons de la voir bientôt renaître avec plus de prétentions que jamais. Si nous ne voulons pas avoir à renouveler l’effort, le devoir est de veiller et de nous tenir en garde contre cette renaissance. Puissions-nous avoir l’énergie et la volonté de l’arrêter, à temps cette fois, pour que l’Europe entière ne soit pas à nouveau ensanglantée, dépouillée et ruinée par la férocité et la rapacité germaniques !