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couple de ces divinités locales si nombreuses dans toutes les parties de la Gaule, dont nous ne connaissons ni la nature, ni la physionomie, et dont le nom seul est parvenu jusqu’à nous par hasard, gravé sur l’offrande de quelque dévot.

Tel est aussi le cas d’un autre dieu, adoré également à Alise, aux portes mêmes de la ville, du côté de l’Est. Lui se nommait Moritasgus et les Gallo-romains l’avaient assimilé à Apollon, non pas l’Apollon, astre du jour, qui parcourt le ciel sur son char étincelant, ni le protecteur des arts, qui siège au milieu des Muses, mais le dieu guérisseur, rival d’Esculape.

A Rome même et dans toutes les parties du monde ancien, de toute antiquité, le culte des sources a été connu et pratiqué ; il suffit de rappeler le nom de la fontaine de Juturne, au pied du Palatin, célèbre par ses cures, de celle de Picus, au bas de l’Aventin, où le roi Numa allait, suivant la légende, demander les secrets qui lui permettaient de conjurer les effets de la foudre, de la fontaine des Camènes où il se rencontrait avec la nymphe Egérie. Mais, en Gaule, ce culte était peut-être plus répandu que partout ailleurs. Nimes avait sa fontaine, séjour du dieu Nemausus, Bordeaux la source de Divona, chantée par Ausone ; aux piscines de Bourbonne-les-Bains, comme à celles’ d’Aquæ Sextiæ présidait le dieu Bormo ou Borvo, dont le nom vient d’être lu, à Aix-en-Provence, sur un autel à lui consacré ; les sources de la Seine étaient placées sous la garde de la déesse Sequana. Moritasgus personnifiait le génie de l’eau bienfaisante qui jaillit sur la pente orientale du mont Auxois. Là on avait élevé en son honneur un temple entouré d’annexés, où l’âme des fidèles trouvait un réconfort et leur corps les avantages d’une cure thermale. L’édifice principal, un sanctuaire, occupait le milieu d’une cour entourée de colonnades ; en avant existait une piscine pavée de mosaïques. Puis venaient plusieurs salles dont l’une, bâtie sur une chambre de chauffe, décèle l’existence de bains chauds ; aux environs, d’autres piscines, d’autres sanctuaires, l’un sur plan rectangulaire, l’autre sur plan octogonal, avec des bassins. Dans toutes ces constructions comme dans le temple lui-même, les fouilleurs ont recueilli des offrandes, preuves de la sainteté et de la célébrité du lieu : des mains et des pieds votifs, des têtes, des seins en pierre, surtout un grand nombre de petites lamelles de bronze où sont dessinés au pointillé deux yeux, juxtaposés