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Questions et Discussions.

Les langues vivantes à l’École normale.

Ce n’est pas sans peine, on le sait, que les langues vivantes ont conquis droit de cité dans l’enseignement public en France. Pour ce qui nous regarde, nos programmes de 1881 ne les admettaient qu’à titre facultatif, et c’est en 1885 seulement qu’elles devinrent matière obligatoire. Trente ans sont passés ; la langue vivante a tenu bon ; il semblerait que sa situation dût maintenant être assurée dans nos écoles ; il n’en est rien. Pour peu qu’une matière d’enseignement se trouve à l’étroit dans l’horaire, ou qu’un nouvel article cherche à s’y faire place, si un sacrifice s’impose, la victime est toute désignée, c’est la langue vivante, et il se trouve toujours quelqu’un pour l’offrir en holocauste. Ainsi propose-t-on (Revue pédagogique, mai 1918, p. 351) de la rendre facultative, c’est-à-dire, pratiquement, de la supprimer, pour faire place à l’agriculture.

On dirait qu’une défaveur latente s’attache à cet enseignement malchanceux. Classé, avec la musique, la gymnastique et le dessin, dans la catégorie inférieure des matières « accessoires », il occupe, dans ce quadrivium d’un nouveau genre, une place encore mal définie. On sait exactement pourquoi nos élèves font de la gymnastique, apprennent la musique, et s’exercent à dessiner. Mais on n’a pas encore réussi à s’entendre sur la véritable utilité de l’enseignement des langues vivantes.

À vrai dire, cet enseignement est à deux fins, l’une immédiate, pratique : apprendre à parler une langue étrangère ; l’autre plus lointaine, moins intéressée, et d’ordre intellectuel : développer l’intelligence critique et le sens littéraire, et prêter secours à l’enseignement du français. Ces deux points de vue ne sont pas inconciliables, loin de là ; c’est une question de méthode, mais,