Page:Revue pédagogique, second semestre, 1907.djvu/253

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
239
À PROPOS D’UN LIVRE SUR ROME

reconquise sur la malaria. On y lit une inscription à la mémoire des travailleurs ravennates qui, appelés des premiers à l’œuvre d’assainissement, moururent à la besogne : « Visiteurs, dit la pierre, venus pour contempler les ruines des siècles antiques, levez un moment la tête : honorez les précurseurs et les martyrs de la nouvelle civilisation de Rome Éternelle, la nuovissima civiltà di Roma Eterna ! » Ainsi le terrassier, l’ouvrier des champs apparaissent comme les héritiers de la force romaine qui, autrefois, a conquis le monde. Une revue d’études maritimes, expression de ce culte pour la marine qui est si vivace en Italie, depuis Duilius, et que M. Schneider n’a pas omis de signaler, a emprunté aux historiens anciens ce titre magnifique : Mare Nostrum. L’orgueil d’être Latins, et de se savoir, dans Rome, au cœur de la latinité, est un des motifs sur lesquels insistent le plus volontiers les jeunes écrivains, dans les livres et les revues. Une ambition qui enfonce ses racines dans un si lointain passé est juste, et sera créatrice. Rome, d’année en année, se peuple et s’anime ; hors des murs, les habitations à bon marché et les usines font reculer le désert. Ville « mondiale », — M. Schneider a recueilli le mot jusque dans les réclames des hôtels, — Rome porte, sans faiblir, le poids effrayant de sa renommée.

Parce que l’existence, dans l’atmosphère romaine, est extrêmement douce, parce que beaucoup de grands souvenirs y planent, parce qu’on y sent, autour de soi, l’activité d’une capitale moderne, la nostalgie de Rome est peut-être, de toutes les nostalgies, la plus aiguë et la plus tenace. Quitter Rome est une vraie peine, comme de perdre quelqu’un. Le livre de M. Schneider est un bon livre, s’il entretient le regret de Rome chez ceux qui l’ont connue, s’il communique aux autres le désir d’aller la connaître ; tous y trouveront un secours pour mieux comprendre la beauté diverse de la ville, la leçon de joie, de force et d’harmonie qui se dégage de sa splendeur.