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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, II.djvu/150

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légitime, celle de découvrir le trait commun à une multitude de phénomènes, mal dirigée cependant et s’attachant aux phénomènes de l’existence au lieu de s’attacher à ceux de la connaissance. Parménide eut le grand mérite de chercher hors du monde sensible, par delà les choses contingentes et passagères, ce lien des êtres, ce principe universel ; mais il ne redressa pas la question, et au lieu de se demander quel est le trait commun de toute connaissance, il continua à poursuivre la réalité dans l’être.

On peut distinguer trois moments dans la philosophie grecque. D’abord on fait passer le problème de l’être avant celui du connaître ; on mêle ensuite les deux questions ; on les met enfin dans l’ordre qui leur convient. Platon appartient à la seconde époque : il distingue le particulier (τὸ γιγνόμενον) et le général (τὸ ὄν) dans l’existence, le particulier (τὸ αἰσθητόν) et le général (τὸ εἶδος) dans la connaissance ; il identifie ensuite le particulier dans l’existence au particulier dans la connaissance, le général dans l’existence au général dans la connaissance. Mais il aurait fallu prouver cette identité, et c’est ce que ce grand philosophe n’a pas fait. Ses deux théories de l’être et du connaître sont restées confuses, et il est incertain qu’il ait bien vu lui-même en quoi elles devaient se distinguer. Ses commentateurs, à coup sûr, n’ont jamais pu les exposer avec clarté séparément ou ensemble. Toutefois, si l’exécution est faible, rien n’égale la grandeur du dessein de Platon, la beauté de ses conceptions, et l’on peut dire que jusqu’à ce jour toute vérité philosophique se retrouve dans l’œuvre bien interprété de Platon, en découle, et que toute erreur est venue d’une mauvaise interprétation de sa doctrine.

La difficulté est de savoir si ce philosophe a considéré dans la connaissance et dans l’être, le particulier et le général comme de simples éléments ou comme des genres différents. Dans le premier cas, le particulier et le général sont deux facteurs dont la synthèse constitue la connaissance ou l’être ; dans le second, il y a des connaissances et des êtres exclusivement particuliers ou généraux. Ce sont deux théories absolument opposées. On ne trouve pas, dans les ouvrages de Platon, une solution formelle ; il faut la déduire de l’ensemble de son système, et l’on arrive à cette conviction que pour lui, le particulier et le général sont bien les deux éléments constitutifs de toute connaissance et de tout être, et non deux genres différents d’êtres ou de connaissances. Si nous affirmons que chaque goutte d’eau se compose d’hydrogène et d’oxygène, nous nions par cela même que l’hydrogène et l’oxygène soient deux genres, deux sortes d’eau. Ainsi de Platon ; mais on ne l’a pas compris. L’obscurité de sa théorie de la connaissance a trompé ses interprètes, et