Page:Rivaudeau - La doctrine d’Epictète stoïcien.djvu/10

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 8 —

en critiquant avec assez de vigueur et même de sévérité la version de Politien et celle de tous les traducteurs qui, en dépit des améliorations apportées au texte grec, persistent encore à suivre ce modèle. Il n’abandonne point par ailleurs le souci d’utiliser chrétiennement le Manuel et se montre par là le descendant des commentateurs latins qui tous, ou presque tous, avaient comme lui abordé Épictète avec des préoccupations morales et religieuses. D’autre part, son souci de traduire un texte exact, son désir de revêtir le plus clairement, disons plutôt le plus pittoresquement possible, de notre belle et savoureuse langue du XVIe siècle la pensée d’Épictète, le place au premier rang des traducteurs français.

Mais il y a plus aujourd’hui que le texte du Manuel, intégralement établi, a permis aux éditions classiques de se multiplier, il est intéressant de suivre dans le passé l’histoire de ces premiers essais de la traduction française du Manuel et de pouvoir ainsi les retrouver même chez des auteurs tout modernes. Reprenons donc brièvement l’histoire des prédécesseurs de Rivaudeau, de ceux dont les traductions ont préparé et rendu possible son œuvre.

Ce sont les traductions latines qui ont donné le premier élan à la vulgarisation du Manuel. Ce mouvement commença en Italie. Au XVe siècle déjà, un essai fut tenté, celui de Perotto, imparfait sans doute, et par cela même infructueux ; mais toutefois il indiquait la direction. Peu de temps après paraissait, en effet, la Version de Politien, dont l’importance fut si grande que non seulement elle fut reproduite par tous les contemporains, mais encore par ceux qui vinrent ensuite, alors même qu’elle ne correspondait plus au texte correct mis en cours. C’est que, d’autre part, des efforts persévérants pour améliorer un texte reconnu défectueux par Politien lui-même, avaient été tentés par des humanistes distingués : les Trincavelli, Caninius, Cratander, Haloander, Scheggius, etc. Tout ce mouvement aboutit à de nouvelles traductions latines, celles de Naogeorgius (1554), de Wolf (1563), traductions intéressantes en ce qu’elles précisent une certaine tendance à faire du Manuel un code de morale