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L’épluchette

Il trouve sans perdre de temps
Un tour à jouer au Silène
Qu’il explique tout d’une haleine.
La commère accepte le plan
Qu’elle trouve mirobolant.
Vite, à sa maison elle file
Se sentant l’âme plus tranquille.

Pour le retour de maître Jean
Qui ne peut tarder à présent,
Le voisin posté sur la route
Par où viendra Gros-Jean, écoute
Et guette bien patiemment
Pour se montrer au bon moment.
Il s’est fait une affreuse tête :
Deux cornes lui font une crête ;
Ses traits sont crûment barbouillés ;
Ses membres, de rouge, habillés.
Il a l’air méphistophélique,
Un air à donner la panique
Au cœur même le mieux trempé.
Au poing un trident bien campé.
Il attend, mais Gros-Jean s’attarde.
La lune à la clarté blafarde
Jette partout un ton discret
Et va protéger son secret.
Enfin Gros-Jean au loin s’annonce ;
Sa voix trahit plus d’une « ponce »,
Car il chante avec une ardeur,
Une chanson à boire en chœur !