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Page:Ryner - Prostitués, 1904.djvu/292

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ment trop de vigueur isolée et raidie, il va, non sans regret pour ce qu’il laisse, vers un altruisme qui semble lui promettre des joies moins rudes et de laisser son sacrifice moins inutile. Hélas ! notre action extérieure ne touche jamais qu’aux bas intérêts : nous pouvons quelque chose pour la sensibilité d’autrui — mais pourquoi ne mépriserions-nous pas la sensibilité voisine autant que la nôtre ? — nous ne pouvons rien pour autrui.

De plus en plus, je crois, Mauclair se donnera à l’altruisme décevant. Il refusera de comprendre l’inutilité nécessaire de tout geste qui ne revient pas vers son auteur en montant ; il renouvellera indéfiniment le geste par lequel on se donne, le geste par lequel on appelle. Qu’importe, d’ailleurs ? Pourvu qu’on triomphe des parties basses de soi, il est presque indifférent de les sacrifier aux autres, ces idoles visibles, ou au Dieu inconnu que chacun porte à son sommet comme une lumière qui n’éclairera point la base de la torche.

Camille Mauclair me fait songer à la désolation de l’âme de Jean errante parmi un siècle où ne passerait nul maître divin. Et je suis tenté de lui dire : « Courage, Jean. La rencon-