Page:Sand - Adriani.djvu/107

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Madame de Monteluz passait les soirées assise sur la terrasse : mais la pluie l’avait fait rentrer. Ils la trouvèrent au salon, sur une chaise de paille, morne, les bras croisés, les yeux fixés à terre ; mais elle tressaillit contre son habitude, en se voyant surprise, et, se levant :

— Ah ! mes amis, s’écria-t-elle, vous ne m’aviez donc pas abandonnée ?

Elle pressa la main de d’Argères d’une main tremblante et glacée, et embrassa Toinette. Deux grosses larmes coulaient lentement sur ses joues.

— Abandonnée ! dit Toinette éperdue. Quelle idée avez-vous eue là ! Moi, vous abandonner !

— Je ne sais pas, répondit Laure, comme honteuse de son effusion, mais j’ai cru…

Elle étouffa un nouveau tressaillement nerveux, et se rassit brisée.

— Qu’est-ce que vous avez donc cru ? lui dit d’Argères, irrésistiblement entraîné à plier les genoux près d’elle et à reprendre ses mains dans les siennes. — Voyons, je vous le disais bien, mademoiselle Muiron, vous avez eu tort de la laisser seule. Elle s’est effrayée de la nuit, de l’isolement, du silence. Elle a eu froid, elle a eu peur.

Et d’Argères, prenant à Toinette le burnous de laine blanche qu’elle apportait, en enveloppa Laure et laissa quelques instants ses bras autour d’elle comme pour la réchauffer. Dans cette amicale étreinte, l’artiste s’aper-