Aller au contenu

Page:Sand - Cadio.djvu/284

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

RABOISSON. Vos beaux yeux peuvent charmer les serpents comme les lions.

LA COMTESSE. Les beaux yeux d’un évêché seront plus puissants encore. Mon oncle le cardinal ratifiera mes promesses. Quant au mariage de Saint-Gueltas, je le blâme absolument ; mais, s’il le faut pour qu’on lui rende justice…

RABOISSON. Il le faut, je vous jure.

LA COMTESSE. Alors, c’est que mademoiselle de Sauvières… (Elle rit.)

RABOISSON. Non ; mais je ne veux pas que pareille chose lui arrive.

LA COMTESSE. Vous ne me persuaderez pas qu’elle ait passé un an près de lui, courant par monts et par vaux, et vivant ensuite sous son toit, sans que sa vertu ait reçu quelque atteinte.

RABOISSON. Sa tante ne l’a pas quittée.

LA COMTESSE. Excepté pendant les longues heures qu’elle passe à épiler ses cheveux blancs et à plâtrer sa figure.

RABOISSON. Voyons, n’abusez pas de vos avantages contre les autres femmes. Vieilles ou jeunes, toutes disparaissent comme de pâles étoiles dans le rayonnement de votre soleil. Soyez généreuse. Je ne vous dirai pas de ne pas rendre Saint-Gueltas infidèle à sa jeune compagne. Il suffit qu’on vous regarde pour être pris ou repris de la belle manière ; mais conduisez-vous comme une grande reine des cœurs que vous êtes. Protégez la faiblesse et mettez du coton au bout de vos flèches. Si le comte de Roseray eût voulu avoir l’esprit de mourir à temps, certes vous étiez la seule femme digne de seconder le futur lieutenant général ; mais il s’obstine à vivre, le fâcheux, et mademoiselle