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Page:Sand - Cesarine Dietrich.djvu/219

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votre part. Je vous le dirai donc, bien que cela paraisse une énormité dans la bouche d’une femme parlant à l’homme qui se méfie d’elle. Pourtant il est fort possible que, quand j’aurai parlé, je ne sois pas la plus confuse de nous deux. Monsieur Gilbert, votre tante croit que j’ai pour vous une passion malheureuse, et vous le croyez aussi. Ah ! je ne rougis pas, moi, en vous le disant, et vous, vous perdez contenance ! J’étais fort ridicule à vos yeux tout à l’heure : si j’étais méchante, je me permettrais peut-être en ce moment de vous trouver ridicule tout seul.

Paul s’attendait si peu à ce nouveau genre d’assaut qu’il fut réellement troublé ; mais il se remit très-vite et lui dit :

— Il me semble, mademoiselle Dietrich, que vous venez de plaider le faux pour savoir le vrai. Si ma tante avait commis l’erreur dont vous parlez et qu’elle me l’eût fait partager, je ne serais ridicule que dans le cas où j’en eusse tiré vanité. Si au contraire j’en avais été contrarié et mortifié, je ne serais que sage ; mais tranquillisez-vous, ni ma tante ni moi n’avons jamais cru que vous fussiez atteinte d’une passion autre que celle de railler et de dédaigner les hommes assez simples pour prétendre à votre attention.

— Ceci est déjà un aveu des commentaires auxquels vous vous livrez ici sur mon compte !

— Ici ? Mettez tout à fait Marguerite de côté dans cette supposition : vous l’avez fascinée. La pauvre enfant fait peut-être sa prière en ce moment pour