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Page:Sand - Cesarine Dietrich.djvu/74

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marier, que l’irruption du vrai monde dans ce petit cloître de fidèles pouvait seule l’autoriser à examiner ses prétendants sans prendre d’engagements avec eux et sans être compromise par aucun d’eux en particulier. M. Dietrich fut forcé de reconnaître qu’en dehors du commerce du monde il n’y a point de liberté, que l’intimité rend esclave des critiques ou des commentaires de ceux qui la composent, que la multiplicité et la diversité des relations sont la sauvegarde du mal et du bien, enfin que, pour une personne sûre d’elle-même comme l’était Césarine, c’était la seule atmosphère où sa raison, sa clairvoyance et son jugement pussent s’épanouir. Elle avait des arguments plus forts que n’en avait eus sa mère, uniquement dominée par l’ivresse du plaisir. M. Dietrich, qui avait cédé de mauvaise grâce à sa femme, se rendit plus volontiers avec sa fille. Une grande fête inaugura le nouveau genre de vie que nous devions mener.

Le lendemain de ce jour si laborieusement préparé et si magnifiquement réalisé, je demandai à Césarine, pâle encore des fatigues de la veille, si elle était enfin satisfaite.

— Satisfaite de quoi ? me dit-elle, d’avoir revu le tumulte dont on avait bercé mon enfance ? Croyez-vous, chère amie, que le néant de ces splendeurs soit chose nouvelle pour moi ? Me prenez-vous pour une petite ingénue enivrée de son premier bal, ou croyez-vous que le monde ait beaucoup changé depuis trois ans que je l’ai perdu de vue ? Non, non, allez ! C’est toujours le même vide et décidément je le déteste ;