Page:Sand - Constance Verrier.djvu/120

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qui vous fuyait ? Eh bien, moi, je déclare que vous n’aviez pas d’autre idéal, et que vous ne pouviez pas l’atteindre parce que vous le cherchiez à contre-sens. Encore aujourd’hui, votre rêve est de trouver un demi-dieu qui vous chérirait sans partage, et à qui vous pourriez être fidèle sans grand mérite, car ce doit être agréable et préférable à tout, j’en conviens, la société d’un demi-dieu !

« Mais il n’y en a pas, vous le savez bien, et quand vous vous êtes confiée à de simples mortels, vous ne pouviez pas leur demander autre chose que de jouer la comédie de l’enthousiasme pendant cinq bu six jours. C’était même beaucoup, et vous n’en avez peut-être rencontré aucun qui pût se maintenir sur ces échasses pendant cinq ou six heures ; tandis que si vous n’eussiez demandé que ce que vous avez trouvé, c’est-à-dire le plaisir, vous eussiez pu changer moins souvent et ne haïr personne. Votre vie racontée tout à l’heure n’est qu’une suite de malédictions et par conséquent d’injustices. Aucun de vos souvenirs ne trouve grâce devant vous, et vous arrivez à vous mépriser vous-même pour avoir été si souvent dupe. Mais ce ne sont pas vos amants, ce sont vos chimères qui vous ont dupée. Parmi tous ces messieurs-là, beaucoup peut-être valaient mieux que vous ; car, au fond, ce que vous vouliez, c’était de l’idolâtrie, et personne en ce monde ne mérite un culte, pas plus l’innocence, qui n’a pas conscience du bien et du mal, que l’épuisement du cœur, qui arrive au même résultat. »