Page:Sand - Constance Verrier.djvu/244

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choses anciennes et solidement belles. Les dressoirs en chêne et le lit renaissance à colonnes sculptées garni de rideaux de damas gros vert, le meuble en tapisserie du temps de Louis XIV et les armoires de Boule, tout était riche, austère et confortable, sans viser à un ensemble d’époque, que nous confessons ne pas aimer non plus, attendu qu’il nous fait trop vivre dans la sensation d’un passé déterminé.

Raoul et Constance furent impressionnés par l’aspect de cette chambre et par les souvenirs qu’elle leur retraçait : Constance, très-émue, s’assit sans rien dire auprès de la cheminée, où flambait un feu clair. On était aux premiers froids. Raoul s’agenouilla près d’elle et se releva aussitôt, effrayé de sa pâleur et de la fixité de ses yeux attachés sur le fond de l’appartement.

— Tu souffres ? s’écria-t-il.

— Non, répondit-elle, ne bouge pas, regarde !

— Regarder quoi ?

— Mon père qui est là ! Tu ne le vois donc pas ?… Non ! Je rêve ! mais je le vois, il chasse deux femmes qui veulent entrer ici… Ah ! ces deux femmes !

Constance se leva, cherchant à se ravoir et à secouer cette hallucination. — C’est passé, dit-elle en souriant. Mais elle retomba sur le fauteuil et renversa brusquement la tête en arrière avec un profond soupir. Raoul la crut morte.

Aux cris de Raoul, Cécile Verrier accourut ; elle aussi crut à une catastrophe. — Cette fois, s’écria-t-elle, c’est bien fini. Elle a mieux aimé mourir que d’être à toi ! elle se sera empoisonnée !