Page:Sand - Constance Verrier.djvu/49

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« Or, en me retournant, je vis que quelqu’un m’écoutait. C’était un vieillard à figure vénérable qui s’approcha de moi d’un air paternel. — Il y a longtemps que je vous observe, me dit-il ; il me semblait que vous aviez l’idée d’en finir avec la vie.

« — J’en ai eu la tentation, lui répondis-je avec confiance ; mais, à présent, c’est passé.

« — Et d’ailleurs, reprit-il, je suis là. Je vous en empêcherais. J’ai eu une bonne idée de venir me promener ici, car je vois que vous êtes désespérée, et peut-être viendrai-je à votre secours. Voyons, que vous est-il donc arrivé ? Je vous connais de vue : vous êtes la maîtresse d’un petit artiste français qui vous donne sans doute de la jalousie ?

« — Il est parti, monsieur, il m’abandonne !

« — Fort bien, répondit-il avec un sourire qui me fit paraître tout à coup effrayante sa figure douce et respectable.

« — Comment, fort bien ! m’écriai-je stupéfaite ; mais aussitôt sa physionomie changea et redevint ce qu’elle m’avait semblé d’abord.

« — Je dis fort bien, reprit-il, comme je dirais : j’en étais sûr. Ce jeune homme était un franc étourdi, indigne de l’attachement d’une charmante enfant comme vous. Je le savais bien, qu’il vous planterait là un beau matin ! Quand je vous voyais, au théâtre, ne chercher votre plaisir que dans ses yeux, et en barque ou en voiture, vous pencher sur lui avec une naïveté d’amour et de confiance adorable, je remarquais son