Page:Sand - Constance Verrier.djvu/55

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« Il avait l’air si vrai que je lui demandai pardon de ma méfiance et le remerciai avec effusion. Il causa longtemps avec moi, me faisant subir une sorte d’examen de conscience, voulant connaître toute ma vie, mon caractère, mes idées, mes goûts, mes principes même. Il s’étonna de me trouver si inculte et, en même temps, il parut frappé de mon bon naturel, et approuva beaucoup la lettre que j’écrivis à mon infidèle, sous ses yeux, et qu’il se chargea de faire partir, ainsi que tous les chiffons et bijoux que j’avais laissés à l’hôtel, et dont je ne voulus rien garder.

« Il me quitta de bonne heure, et je ne le revis pas de la semaine ; mais il m’envoya des étoffes à choisir, du linge et des ouvrières pour me faire un trousseau. Bien que j’eusse carte blanche, je ne voulus prendre que les choses les plus simples, et me bornai au strict nécessaire d’une tenue de petite bourgeoise à la campagne. J’avais pourtant le goût de la parure, et cette discrétion me coûta beaucoup.

« Ce qui m’en consola fut de voir arriver un professeur de langues italienne et française et un maître de musique ; tous deux âgés et graves, qui me traitèrent comme une demoiselle de bonne maison et mirent tous leurs soins à m’instruire. Je me jetai dans le travail avec une ardeur fébrile, et je fis, en six mois, des progrès que d’autres ne font pas en six ans. J’y portais de l’orgueil, un orgueil de la conscience et du cœur, voulant alléger les sacrifices de mon bienfaiteur et lui en montrer ma reconnaissance.