Page:Sand - Constance Verrier.djvu/71

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de quoi payer mes études, ou, au moins, de quoi vivre en étudiant seule, et je ne voyais que le théâtre qui pût accueillir un pauvre enfant perdu comme moi. Je n’en savais pas encore assez pour espérer le moindre succès. Mais là, du moins, j’entendrais les premiers sujets, et je pourrais peut-être me former par la seule audition, comme tant d’autres !

« Il s’agissait de savoir si j’étais capable de chanter les seconds rôles, ou même les troisièmes. Je me rendis au théâtre, et j’entendis outrageusement siffler la prima donna. Elle avait pourtant du talent, la pauvre fille, cent fois plus de talent que je n’en avais alors ; mais elle était vieille, fatiguée, et chantait tout son rôle un quart de ton trop haut. Dès le lendemain, j’allai m’offrir pour la remplacer. C’était un coup d’audace ; mais j’avais compris que le public tenait peu de compte de la science et ne demandait que des moyens.

« Le directeur de la troupe musicale, un vieux connaisseur très-ironique, se mit au piano et me fit chanter quelques phrases. — C’est bien, me dit-il mélancoliquement, vous avez tout ce qu’il faut pour réussir ici : une voix magnifique, une jolie figure et une ignorance effrontée !

« — Je le sais, lui répondis-je en riant, mais quand la pauvre fille, sifflée hier soir, a débuté, en savait-elle plus que moi ?

« — Non ! elle ne savait rien.