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Page:Sand - Contes d’une grand’mère, 1906.djvu/157

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— Laisse brouter Bibi, me dit-il en mettant pied à terre ; il a besoin de souffler. Je ne suis pas sûr d’avoir suivi le bon chemin, je vais voir.


Il s’éloigna et disparut dans les buissons ; Bibi se mit à brouter les fines herbes et les jolis œillets sauvages qui foisonnaient avec mille autres fleurs dans ce pâturage inculte. Moi, j’essayai de me réchauffer en battant la semelle. Bien que nous fussions en plein été, l’air était glacé. Il me sembla que les recherches du maître duraient un siècle. Ce lieu désert devait servir de refuge à des bandes de loups, et, malgré sa maigreur, Bibi eût fort bien pu les tenter. J’étais en ce temps-là plus maigre encore que lui ; je ne me sentis pourtant pas rassuré pour moi-même. Je trouvais le pays affreux et ce que le maître appelait une partie de plaisir s’annonçait pour moi comme une expédition grosse de dangers. Etait-ce un pressentiment ?


Enfin il reparut, disant que c’était le bon chemin et nous repartîmes au petit trot de Bibi, qui ne paraissait nullement démoralisé d’entrer dans la montagne.