Page:Sand - Contes d’une grand’mère, 1906.djvu/88

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

» — Ce n’est pas un chien, disaient-ils, c’est un cheval !

» Et toute la journée les petites filles m’appelèrent cheval blanc, ce qui, je dois le confesser, me flatta infiniment.

» On me sut d’autant plus de gré de ma raison et de ma douceur avec les enfants que je ne supportais ni injures ni menaces de la part des autres. Quelque amitié que j’eusse pour mon maître, je lui prouvai une fois combien j’avais à cœur de conserver ma dignité. J’avais commis une faute contre la propreté par paresse de sortir, et il me menaça de son fouet. Je me révoltai et m’élançai au-devant des coups en montrant les dents. Il était philosophe, il n’insista pas pour me punir, et, comme quelqu’un lui disait qu’il n’eût pas dû me pardonner cette révolte, qu’un chien rebelle doit être roué de coups, il répondit :

» — Non ! Je le connais, il est intrépide et entêté au combat, il ne céderait pas ; je serais forcé de le tuer, et le plus puni serait moi.

» Il me pardonna donc, et je l’en aimai d’autant plus.