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Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 1.djvu/121

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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

poitrine volcanique n’absorbe plus l’air vital nécessaire aux habitants de la terre, le climat du pays est devenu plus froid, l’air plus subtil. Les vents qu’emprisonnaient tes poumons, les tempêtes qui se brisaient contre ton flanc comme au pied d’une chaîne de montagnes, se sont déchaînés avec furie le jour de ton départ. Toutes les maisons de la Châtre ont été ébranlées dans leurs fondements, le moulin à vent a tourné pour la première fois, quoique n’ayant ni ailes, ni voiles, ni pivot. La perruque de M. de la Genetière a été emportée par une bourrasque au haut du clocher, et la jupe de madame Saint-0… a été relevée à une hauteur si prodigieuse, que le grand Chicot assure avoir vu sa jarretière.

Et toi, petit Sandeau ! aimable et léger comme le colibri des savanes parfumées ! gracieux et piquant comme l’ortie qui se balance au front battu des vents des tours de Châteaubrun ! depuis que tu ne traverses plus avec la rapidité d’un chamois, les mains dans les poches, la petite place où tu semas si généreusement cette plante pectorale qu’on appelle le pas d’âne et dont Félix Fauchier a fait, grâce à toi, une ample provision pour la confection du sirop de quatre fleurs, les dames de la ville ne se lèvent plus que comme les chauves-souris et les chouettes, au coucher du soleil ; elles ne quittent plus leur bonnet de nuit pour se mettre à ta fenêtre, et les papillotes ont pris racine à leurs cheveux. La coiffure languit, le cheveu dépérit, le fer à friser dort inutile sur les tisons refroidis. La