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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND
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et de plus beau au monde. Il a été pire et meilleur, selon les temps.

Aujourd’hui, c’est un mélange d’enthousiasme et d’égoïsme qui lui donne, chez les femmes, un caractère tout particulier. Privées des salutaires préjugés de la dévotion, abandonnées à la fermentation de l’intelligence qui pénètre à tort et à travers dans leur éducation, elles n’en sont pas moins rigoureusement flétries par l’opinion. L’opinion, c’est, d’un côté, l’intolérance des femmes laides, froides ou lâches ; de l’autre, c’est la censure railleuse et insultante des hommes, qui ne veulent plus de femmes dévotes, qui ne veulent pas encore de femmes éclairées, et qui veulent toujours des femmes fidèles. Or il n’est pas facile que la femme soit philosophe et chaste à la fois. Cela ne se voit guère ; à moins qu’il n’y ait pas de tempérament, et encore, il ne faut pas s’y fier. La vanité fait faire plus de folies et de sottises.

Les femmes de notre temps ne sont donc ni éclairées, ni dévotes, ni chastes. La révolution morale qui devait les transformer au gré de la nouvelle génération masculine a été prise de travers. On n’a pas voulu relever la femme à ses propres yeux, on n’a pas voulu lui créer un rôle noble et la mettre sur un pied d’égalité qui la rendît apte aux vertus viriles. La chasteté eût été glorieuse à des femmes libres. À des femmes esclaves, c’est une tyrannie qui les blesse et dont elles secouent le joug hardiment. Je ne puis les en blâmer.

Mais je ne les estime pas. Elles ont perdu leur