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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

vendre un jour ta conscience pour de l’argent, des plaisirs ou des vanités. Je sais que cela ne sera pas ; mais je dois te montrer les inconvénients des relations avec ceux qui se regardent comme supérieurs aux autres, et à qui la société donne, en effet, de l’autorité sur vous.

Garde-toi donc de croire qu’un prince soit, par nature, meilleur et plus utile à écouter qu’un autre homme. Ce sont, au contraire, nos ennemis naturels, et, quelque bon que puisse être l’enfant d’un roi, il est destiné à être tyran. Nous sommes destinés à être avilis, repoussés ou persécutés par lui.

Ne te laisse donc pas trop éblouir par les bons dîners et par les fêtes. Sois un vieux Romain de bonne heure, c’est-à-dire, fier, prudent, sobre, ennemi des plaisirs qui coûtent l’honneur et la sincérité.

Bonsoir, mon ange ; écris-moi. Aime ton vieux George, qui t’aime plus que sa vie.


CXXXIX

À MADAME D’AGOULT, À GENÈVE


26 février 1836.


Je ne vous écris qu’un mot à la hâte, chère bonne et belle Marie. Je suis accablée d’affaires, de travail et de courses. Je vous écris d’une chambre d’auberge,