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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

Rome et la Hongrie, par le sacrifice et l’héroïsme. Il patientera avec ses maux ; car on vit avec la misère et l’ignorance, malheureusement. Il lui faudrait des invasions et de grands maux extérieurs pour le réveiller. S’il plaît à Dieu de nous secouer ainsi, que sa volonté s’accomplisse ! Nous irions plus douloureusement mais plus vite au but.

Il faut bien se faire ces raisonnements, mon ami, pour accepter la torpeur politique qui assiste impassible à tant d’infamies. Autrement, il faudrait maudire ses semblables, haïr ou abandonner leur cause. Mais je ne vous dis pas tout cela pour vous détourner d’agir dans le sens que vous croyez efficace. Il faut toujours agir quand on a foi dans l’action, et la foi peut faire des miracles. Mais, si, dans le parti des idées en France, vous ne trouvez pas un concours digne d’une grande nation, rappelez-vous le jugement que je vous soumets, afin de ne pas trop nous mépriser ce jour-là. Soyez sûr que nous n’avons pas dit notre dernier mot. Nous sommes ce que nous a faits le régime constitutionnel, mais nous en reviendrons. Nous ne sommes pas tous corrompus. Voyez ce fait significatif du peuple de Paris sifflant sur le théâtre l’entrée des Français à Rome[1].

Bonsoir, cher frère et ami ; ne m’écrivez que quand

  1. Au dernier tableau de Rome, pièce à spectacle, de MM. Labrousse et Laloue, représentée sur le théâtre de la Porte-Saint-Martin, le 29 septembre 1849. La pièce fut interdite à la quatrième représentation.