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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

adversaire d’agir. C’est ce qui arrive maintenant aux quatre conspirations sourdes que je t’ai signalées hier. On en ajoute une cinquième aujourd’hui, et je crois qu’il y en a deux ou trois autres. Les légitimistes ont voulu faire peur à la République, le juste-milieu, les Guizot et les Régence, les Thiers et Girardin, j’en suis sûre, ont aussi joué leur jeu, avec ou sans espoir d’amener un conflit.

Mais toutes ces menaces se paralysent mutuellement ; tous les clubs sont en permanence pour la nuit, tous armés, barricadés, ne laissant sortir aucun membre, dans la crainte qu’on ne vienne les assassiner ; et, comme tous ont la même venette, tous restent enfermés sans bouger ; le remède est donc dans le mal même. Il y en a d’exaltés qui seraient d’avis d’attaquer les premiers ; mais, comme ils ont peur d’être attaqués auparavant, ils se tiennent sur la défensive. C’est stupide, et la tragédie annoncée devient une comédie.

Je viens de quitter le gros Ledru-Rollin, prêt à se hisser sur un gros cheval, pour faire le tour de Paris, en riant et en se moquant de tout cela. Étienne est en colère et dit que ça l’embête. Borie et son cousin, sont enfermés au club du palais National et pestent, j’en suis sûre, de ne pas être à pioncer dans leur lit.

La population ne dort que d’un œil, attendant le tocsin et le canon. M. de Lamartine, qui veut être bien avec tout le monde, a offert un asile dans son mi-