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Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 6.djvu/27

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inévitable de leur longue carrière, un coup bien terrible. Et cela au milieu des douleurs générales, cela peut être mêlé à des inquiétudes personnelles pour tes frères, actifs probablement dans la marine et dans l’armée ! Je te plains bien, mon pauvre enfant ; quelle année fatale ! que de malheurs en peu de temps pour toi, pour tous !

Nous étions heureux, nous, dans notre coin. Maurice, après avoir été dangereusement malade au printemps, était guéri. Nous n’avions qu’un souci : sortir de la sécheresse. Et voilà une pluie de sang ! on ne vit plus, on n’existe plus pour soi-même. Rien ne sert d’être heureux chez soi quand la patrie souffre de tels maux.

J’avais toujours prévu un dénouement sinistre à cette ivresse aveugle de l’Empire ; mais fallait-il la voir payée si cruellement ! Quelle que soit l’issue, le cœur est navré pour longtemps. Pour quelques-uns, pour beaucoup, ce sera pour toujours.

Dis-nous un mot de toi, et sache bien que tes peines sont toujours nôtres.

G. SAND.