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Page:Sand - Cosima.djvu/20

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mépris pour la conduite de cet homme léger qui, en passant dans une ville, ne trouve rien de plus honorable, de plus utile à entreprendre, que de ternir l’honneur d’une femme et de détruire la confiance d’un mari.

LE CHANOINE.

J’aime à t’entendre parler ainsi. Rassure-toi donc, ma fille ; tu n’as point fait un faux serment. Tu aimes toujours ton mari.

COSIMA.

Oh ! de toute mon âme !… Et pourtant je souffre, je tremble… Tenez, mon oncle, je suis bien malheureuse ! Elle fond en larmes.

LE CHANOINE.

Ô cœur de femme ! éternelle énigme ! Essuie ces pleurs, Cosima ; c’est le honteux témoignage de la faiblesse. Pourrais-tu songer un instant à préférer un étranger à ton meilleur ami ? un homme sans mœurs et sans foi au plus honnête et au plus généreux des hommes ? Rentre en toi-même, Cosima. Chasse ces vaines imaginations. La peur est un piège de l’ennemi du salut. Écoute, ceci demanderait un plus long entretien. L’heure est avancée. J’irai demain chez toi, et nous causerons. J’espère te faire mieux lire en toi-même et te relever à tes propres yeux. Retourne chez toi, ma fille. Je n’aime pas à voir une jeune femme fréquenter les églises le soir. Ces promenades nocturnes ne sont pas assez protégées par un jeune homme comme Néri.

COSIMA.

Néri ? n’est-il pas l’ami, presque le fils adoptif de mon mari, le mien par conséquent ? Il est dévoué, il est brave ; personne n’oserait me dire un mot lorsqu’il m’accompagne.

LE CHANOINE.

Je le crois bien ! Mais je t’engage à ne sortir que le jour. Depuis quelque temps, tu te livres à une dévotion extérieure qui, je te le dis avec la simplicité d’un ami, ne me semble pas propre à ramener le calme dans ton âme… Je crains que toute cette ferveur ne soit de l’agitation, et que sais-je ?…