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— Il n’en saura rien ; et d’abord, nous allons sortir par la fenêtre. Je t’aiderai à sauter.

— Ce ne sera pas la première fois.

Nous voilà sur la route. Un froid de loup. La gelée craque sous nos pieds. Mais la nuit est claire et les étoiles sont gaies.

Nous prenons à travers champs, c’est le plus court. Nous gagnons le chemin de Montgivray. Le pont n’est pas raccommodé, mais la rivière est prise. Nous la passons sur la glace en deux endroits. Après une petite heure de marche, nous arrivons à la ville par le chemin qui longe le cimetière, et nous montons la rue des Capucins. Tout dort. L’horloge sonne la demie après onze heures. La ville est muette. Pas une lumière aux fenêtres, pas un chien dans les rues, pas un réverbère allumé. C’est comme tous les jours.

Mais, en approchant de l’hôtel Saint-Germain, nous entendons les violons et les cris des danseurs de bourrée. C’est le bal des ouvriers. Nous mettons nos masques, nous payons six sous chacun et nous entrons.

Personne n’est déguisé. Notre entrée fait sensation. On nous traite de chienlits. Nous prenons place à la danse, moi faisant l’homme et con-