Page:Sand - Francia.djvu/31

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surgir une armée nouvelle avec des plumets, des titres, des galons et des noms nouveaux ; toute cette ivresse était à la surface, le cœur et les sens n’y jouaient qu’un rôle secondaire. La marquise était sage, c’est-à-dire qu’elle n’avait jamais eu d’amant ; elle était comme habituée à se sentir éprise de tous les hommes capables de plaire, mais sans en aimer assez un seul pour s’engager à n’aimer que lui. Elle eût pu être une femme galante, car ses sens parlaient quelquefois malgré elle ; mais elle n’eût pas eu le courage de ses passions, et un grand fonds d’égoïsme l’avait préservée de tout ce qui peut engager et compromettre.

Elle reçut donc Mourzakine avec autant de satisfaction que d’imprévoyance.

— Je l’aimerai, je l’aime, se disait-elle dès le premier jour ; mais c’est un oiseau de passage, et il ne faudra pas l’aimer trop.

Ne pas aimer trop lui avait toujours été plus ou moins facile ; elle ne s’était jamais trouvée aux prises avec une volonté bien persistante en fait d’amour. Le Français de ce temps-là n’avait point