Page:Sand - Jean de la Roche (Calmann-Levy SD).djvu/170

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ne m’oublierait pas : c’eût été là, de ma part, un sentiment odieux et dont vous me savez incapable. Vous me voyez émue et non pas étonnée ou affligée de ce que j’apprends.

» — Alors, insinua spirituellement M. de Bressac, mademoiselle pleure de joie ?

— Eh bien, qui sait ? peut-être ! répondit Love avec beaucoup de simplicité et de noblesse d’intention. Vous me dites qu’il est heureux, qu’il a une femme charmante : j’en remercie Dieu, et j’ai assez d’amitié pour votre cousin pour pleurer de chagrin ou de joie selon qu’il lui arrivera du bien ou du mal.

» Voilà tout, elle n’a pas dit un mot de plus ou de moins, et votre cousin n’est qu’un menteur, comme le sont tous les fats ; mais ce qu’il n’a pas vu et ce que je n’invente pas, moi, c’est qu’à partir de ce moment-là miss Love, que j’avais surprise quelquefois rêveuse et presque mélancolique, est redevenue gaie comme elle l’était avant de vous connaître, plus gaie même, plus vivante, plus active et d’une sérénité admirable ; c’est qu’elle a pris son parti de rester fille, et qu’elle a vu là le seul genre de vie qui pût lui permettre de se consacrer exclusivement aux siens. Elle s’est expliquée avec moi là-dessus bien des fois depuis trois ans, et tout dernièrement encore elle me disait :

» — Ne me parlez plus de mariage. Je ne veux plus